Ladilafé

Festival Fnac Live 2012 : notre rencontre avec Tryo

Ecrit par Sabrina Cicchini
le 5 août 2012

Alors qu’ils s’apprêtaient à monter sur la scène du Festival Fnac Live, Manu et Guizmo du groupe Tryo ont accepté de nous rencontrer. Musique, voyages, engagement et amitié étaient au programme de cette interview. TDN : Tryo merci de nous recevoir. Manu : c’est un plaisir. Guizmo : salut à vous ! TDN : le […]

Alors qu’ils s’apprêtaient à monter sur la scène du Festival Fnac Live, Manu et Guizmo du groupe Tryo ont accepté de nous rencontrer. Musique, voyages, engagement et amitié étaient au programme de cette interview.

TDN : Tryo merci de nous recevoir.

Manu : c’est un plaisir.

Guizmo : salut à vous !

TDN : le 27 août sort votre nouvel album Ladilafé. Comment ce nom vous est venu ?

Guizmo : alors Ladilafé, c’est un hommage à Patricia Bonnetaud qui est décédée d’un cancer en février et qui était notre patronne, notre amie qui nous a signés dans les tout débuts. Elle nous a, je pense, protégés et nous a appris à nous autogérer. On a découvert avec elle le monde de la musique. C’était quelqu’un qui comptait beaucoup pour nous et qui avait monté un label qui s’appelait Ladilafé.

Il y a d’ailleurs dans l’album une chanson qui parle justement du combat pour la vie, contre la maladie, du plaisir, de l’amour. C’était quelqu’un de très plein, qui vivait la musique à fond. C’était la maman des Mass Hysteria, Zebda, la Rue Kétanou, Lofofora, Nosfell, etc… 

C’était quelqu’un de très important dans ce milieu à part de la chanson française et du rock. C’est une dédicace à travers cette chanson et à travers le titre de l’album. Elle a en plus validé la chanson, puisqu’elle a eu le temps de l’écouter, de suivre les mix, l’évolution du morceau. Elle a aussi validé tout l’album un peu avant de partir.

TDN : que peut-on attendre de cet album au niveau des sonorités?

Manu : il y a des virages. On trouve quand même le reggae acoustique traditionnel à la Tryo mais avec des couleurs nouvelles sur certains morceaux comme des machines, des platines, du scratch et puis des samples, des sons électro sur trois chansons.

Guizmo : de la basse aussi. Les percus sont plus fournies que dans les albums précédents.

Manu : c’est beaucoup plus pêchu.

Guizmo : on est partis enregistrer à Real World à Bristol dans les studios de Peter Gabriel. On avait cette envie d’enregistrer dans un studio spacieux. Daniel, le percussionniste de Tryo, est un fan absolu de Peter Gabriel. C’était l’un de ses vieux rêves. Il y a mis encore plus d’énergie et de cœur. Ca s’entend sur ce disque. Manu a fait aussi beaucoup de créations.

Manu : sur place j’ai fait beaucoup d’arrangements. J’ai fait des prises de guitare évidemment et des percus, des arrangements de cordes, de cuivres.

Guizmo : ça flirte un peu avec la funk disco sur un titre. Il y en a un autre qui part dans le monde arabe. C’est du reggae mais très arabisé. On aime bien imager les textes. Là on parlait du Printemps arabe et on a voulu partir au bled, on a mis un oud (ndlr : luth arabe), des violons. Ibrahim Maalouf est venu poser une trompette sur ce morceau.

TDN : donc il y a des changements sur la forme. Sur le fond, les titres sont-ils tous engagés ou des thèmes légers sont aussi abordés ?

Guizmo : il y a toujours un peu de tout. Je crois qu’il y a un énorme amour de Desproges, de Coluche, de Renaud. Il y a une envie de dire les choses mais toujours avec un peu d’ironie. Je trouve que c’est un album plus ironique que celui d’avant.

On sourit plus. Il y a des chansons très légères qui parlent de la confrontation générationnelle entre l’ado et le papa, sur la manière de se fringuer, des sujets pas forcément militants. 

Puis il y a un morceau qui s’appelle Marine est là où  Marine Le Pen refait sa toilette, avec le Front national qui soit disant change de fond. Mais on est toujours dans un esprit plutôt rigolo, sur un ton enjoué et non pas sur un ton dur et énervé.

Manu : comme disait Christophe qui n’est pas là, il y a sur certaines chansons, une envie de décrypter. Quand on parle du FN et de Marine Le Pen, on décrypte sa cosmétique politique, le fait qu’elle se rachète une image, qu’elle refait la façade du Front national. On a envie de dire que c’est juste un maquillage et que le fond n’a pas changé.

Guizmo : il y a aussi Greenwashing qui est une critique de l’éco-blanchiment et de toutes ces grandes marques qui nous vendent du vert. Areva nous fait croire que grâce à eux les forêts poussent. Des choses comme ça inspirent les chansons.

TDN : depuis le dernier album vous avez effectué deux tournées en Amérique latine. Pourquoi cette région ? A cause de Daniel ?

Manu : on nous l’a proposé et on en avait envie. Daniel est chilien d’origine. Il avait huit ans quand il est arrivé en France et il est retourné dans son pays il y a quelques années après avoir obtenu la nationalité française. C’était un réfugié politique. Quand il est retourné là-bas, il a pu retrouver des membres de sa famille. 

Il avait ce vieux rêve de faire une tournée en Amérique latine. C’est progressivement devenu le rêve du groupe. On était attendus dans certains endroits comme Buenos Aires. Pas mal de gens connaissent Tryo. Dans certaines écoles les textes de Tryo sont étudiés. Ça nous a bluffés !

Guizmo : c’est vrai qu’on est restés assez scotchés. Lors de la première tournée on a doublé toutes les dates. Tout était complet. On pensait jouer que pour la communauté française et on s’est retrouvés avec des gens locaux qui nous applaudissaient. C’était magique. Ils nous ont demandé de revenir. C’est ce qu’on a fait l’année d’après. Cette fois on est passés par le Brésil où on a financé notre concert dans un club de Sao Paulo. C’était vraiment une soirée magique.

Manu : entretemps on a fait le Népal. On a joué à Katmandou où on est restés une semaine. C’était extraordinaire.

Guizmo : c’était un festival qui s’organisait autour de l’écologie parce que Katmandou est une des villes les plus polluées d’Asie. On voulait sensibiliser les gens aux problèmes de la pollution. Le festival s’organisait avec le réseau français installé et les gens de la commune de Katmandou. C’était dans des temples du patrimoine mondial de l’Unesco. 

On a joué avec Lo’Jo, un groupe d’Angers qu’on adore. On a rencontré un groupe de là-bas, Kutumba, qui sont des stars locales. Je les ai reçus chez moi en Bretagne. On a fait quelques concerts. C’était très chouette. Une vraie rencontre musicale et humaine.

Manu et Guizmo entonnent alors un petit air.

TDN : ces voyages influencent-ils votre musique ?

Guizmo : inconsciemment oui. Manu a beaucoup voyagé et a découvert pleins d’instruments comme le oud en Egypte ou le tablâ en Inde. Il a toujours eu ce plaisir d’aller choper la musique dans les autres pays. J’ai travaillé avec des Touaregs sur des airs rebelles et j’ai fait un projet qui est pas encore abouti avec Sally Nyolo, ancienne chanteuse des Zap Mama qui m’a fait chanter en pygmée. Tu ressors de là enrichi. Puis t’arrives pour faire ton album et t’as des réflexes qui reviennent. C’est des choses qu’on ne visualise pas tout de suite, puis avec du recul tu te dis « ça vient de là ».

Manu : quand il a fait ses maquettes pour le disque, il a fait des harmonies vocales et je me suis dit « ça se voit qu’il a travaillé avec une Africaine. » Pour moi qui a beaucoup voyagé en Afrique et en Inde, quand il y a ces couleurs là, ça me saute aux yeux, même si c’est que des petites bribes.

TDN : le groupe existe depuis dix-sept ans mais il y a quelques années vous avez fait une pause. A l’époque, c’était provisoire ou définitif ?

Guizmo : jamais on s’est dit qu’on arrêtait mais on a toujours voulu préserver l’amitié, le public. On a eu la chance, jusqu’à maintenant, de vendre des disques, de pouvoir nous autogérer et de nous donner le temps. C’est vraiment le fait de prendre notre temps qui nous a préservé sur ces dix-sept années. On a pu prendre du recul pour nous, pour nos familles, pour faire d’autres choses. 

Mali fait de la mise en scène, il bosse sur les chantiers des Franco toute l’année, il a fait son album solo. Ça lui a permis de chanter des choses qu’on n’aurait jamais chantées avec lui. Moi j’ai été faire mes petits projets avec Pause, M’Panada, avec le Pied de la pompe en ce moment. 

Manu a fait des collaborations avec des chanteuses africaines, des arrangements. Daniel fait beaucoup de vidéos. Il a réalisé des clips. On se retrouve en général après une année ou deux et on arrive riches de pleins de choses et on est contents de se revoir.

Manu : il y aussi un truc super important, c’est que tout le monde est père de famille, sauf moi. Rires. Mais j’ai bon espoir. Quand t’aimes aussi avoir une famille, être proche des gens que tu aimes, ça compte autant que ton épanouissement professionnel, sinon plus. Il faut essayer de gérer les deux.

Guizmo : puis en même temps on se voit régulièrement, puisqu’on est producteurs, éditeurs, on gère notre tournée. On a notre mot à dire collégialement sur tout ce qui se décide. Ça va des gens qu’on va employer sur la tournée au prix du disque. On parle régulièrement de notre histoire, de notre futur, pour savoir comment vont les uns et les autres.

TDN : qu’est-ce qui vous attend cette année ?

Guizmo : tournée, tournée, tournée. On est impatients ! On a super envie d’aller jouer. On a fait une pré-tournée de quinze dates au mois de juin. C’est passé à une vitesse folle et on aurait bien refait une petite quinzaine derrière. On attend les premières dates au mois d’octobre avec impatience.

Manu : cet album on a mis un an à le faire. Au bout d’un moment t’en peux plus, tu bouillonnes. T’as envie que les gens le découvrent.

TDN : merci Guizmo, merci Manu !

Guizmo : de rien !

Manu : au plaisir !

Propos recueillis par Sabrina Cicchini

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