Tout savoir sur Vanessa Springora et « Le consentement »

Ecrit par Marylin
le 28 avril 2024

Si, comme moi, vous êtes passée à côté de la sortie du livre « Le consentement » de Vanessa Springora en janvier 2020, le film sorti fin 2023 vous a sûrement mis la puce à l’oreille. Récompensé par le Grand Prix des Lectrices d’Elle et le Prix Jean Jacques Rousseau de l’autobiographie en 2020, son autrice a également […]

Si, comme moi, vous êtes passée à côté de la sortie du livre «Le consentement» de Vanessa Springora en janvier 2020, le film sorti fin 2023 vous a sûrement mis la puce à l’oreille. Récompensé par le Grand Prix des Lectrices d’Elle et le Prix Jean Jacques Rousseau de l’autobiographie en 2020, son autrice a également été sacrée Autrice de l’année 2020 par les trophées de l’édition. Focus sur ce livre qui a inspiré Judith Godrèche et l’a poussée à dénoncer la situation similaire qu’elle a vécue avec Benoît Jacquot. Vanessa Springora et Gabriel Matzneff, emprise, complaisance et pédophilie. 

«Le Consentement», un livre avant d’être un film

Vanessa Springora et « Le consentement »

Personnellement, je n’aime généralement pas les films adaptés de livres, il manque toujours quelque chose. Les mots ont une puissance que les images peinent à retranscrire. Après avoir lu «Le consentement de Vanessa Springora», j’ai quand même voulu voir ce film dont tout le monde parlait.
Ce livre est une véritable claque d’authenticité, une plongée profonde dans l’intimité et les rouages de l’emprise. Laissez-moi vous dire que le film en est le complément indispensable. Fidèle jusque dans les détails, il vient ajouter des images fortes aux mots puissants de Vanessa Springora. On ne ressort pas indemne de cette lecture et de ce visionnage. Si le livre se lit très vite, le film vient illustrer de façon très nette les mots de l’autrice. 

Le pitch

Paris, novembre 1985. Vanessa Springora a 14 ans, c’est une adolescente assez effacée, dont la mère est attachée de presse dans l’édition. Elle rencontre Gabriel Matzneff au cours d’un dîner littéraire. Très vite, il la couvre de son regard de prédateur, de ses gestes ambigus qui troublent la jeune adolescente férue de littérature. Comme le dit si bien Denise Bombardier en 1990 dans l’émission de Bernard Pivot («Apostrophes», où Gabriel Matzneff était encensé par tous pour ses livres sulfureux) «Gabriel Matzneff attire les jeunes filles avec sa notoriété». Là où les pédophiles anonymes le font avec des bonbons… 

Vanessa Springora a 14 ans, Gabriel Matzneff en a 49. Malgré cette différence d’âge et le fait que la jeune fille n’a pas atteint la majorité sexuelle (fixée à 15 ans), ils entament une relation intime

Si la scène du dépucelage de l’adolescente était dure dans le livre, elle l’est tout autant dans le film. L’adolescente ne parvient pas à s’offrir à son vieil amant, elle souffre, il passe donc par la porte arrière en lui susurrant à l’oreille : «comme un petit garçon»… 

Elle mettra fin à cette relation quand elle réalisera qu’au lieu de la formidable histoire d’amour qu’eux seuls peuvent comprendre, elle n’est qu’une ligne sur la liste des conquêtes enfantines de Gabriel Matzneff. 

Gabriel Matzneff et l’apologie de la pédophilie

Fascinée par l’auteur, la jeune Vanessa veut lire ses livres, pour tout savoir de lui. Gabriel Matzneff le lui interdit. Il faut croire qu’être trop jeune pour lire certains ouvrages n’empêche pas d’être l’objet sexuel de son auteur! Quand elle les lira en son absence, elle sombrera dans un véritable enfer. 

Apologie de la pédophilie, ni plus ni moins. De nombreuses jeunes filles avant elle, des garçons aussi. Prostitution enfantine à Manille… 

C’est suite à ce déclic qu’elle commencera à prendre ses distances avec lui, non sans passer par la case de la déscolarisation et des troubles psychotiques qui lui vaudront un internement. 

Vanessa Springora, les mécanismes de l’emprise

Vanessa Springora « Le consentement »
@FranceInfo

Ce qui fait du livre de Vanessa Springora, et du film éponyme, des œuvres frappantes, c’est la précision avec laquelle l’emprise est décrite. 

Aucune contrainte physique n’est évoquée. Vanessa Springora est une adolescente empruntée qui rêve d’écrire et qui est «choisie» par le maître des milieux littéraires. Elle écrira d’ailleurs dans son journal «comment un homme comme lui peut m’avoir remarquée, moi?». Dès leur première rencontre, il la sort de son rôle d’enfant accompagnant sa mère à un repas ennuyeux, à grands coups de regards appuyés et pénétrants. Il lui écrit des lettres grandiloquentes où il parle d’elle comme d’une muse, du plus grand amour qu’il ne pourra jamais avoir au cours de sa vie.  

Après leur premier baiser, elle virevolte dans les rues de Paris, le casque sur les oreilles comme n’importe quelle adolescente amoureuse. 

Pour lui plaire, elle subira une intervention chirurgicale pour rendre la pénétration possible… 

 «Le consentement», une histoire de complaisance

Ce qui ressort également de l’œuvre de Vanessa Springora, c’est la complaisance qui entourait Gabriel Matzneff. Parce que leur relation n’a pas été cantonnée à une chambre d’hôtel! De dîners littéraires en concerts, il s’affichait avec elle sans aucune honte. Ses livres relataient très précisément ses aventures pédophiles et le tourisme sexuel dont il était adepte. Sans que personne ne trouve rien à y redire. 

Pas même le psy que Vanessa Springora rencontrera pendant son hospitalisation à Necker pour des crampes dans la main. Pas plus sa mère, à qui elle s’est confiée dès le début de la relation et qui après avoir mollement protesté, l’a laissée rejoindre son amant dans sa chambre d’hôtel. Pas même la Brigade des mineurs, alertés par des lettres anonymes. 

Vanessa Springora, la parole libérée

En 2013, Gabriel Matzneff reçoit le Prix Renaudot essai. Vanessa Springora, alors éditrice, veut faire entendre sa version pour se réapproprier son histoire. Dans ces livres, il a tout raconté, de son point de vue, «celui du chasseur». Dans les émissions culturelles où il était reçu, il n’a jamais caché aucun de ses penchants.
Pourquoi n’a-t-elle pas porté plainte plus tôt ? Parce qu’elle était consentante (enfin, autant qu’on peut l’être à 14 ans, alors même que la loi ne nous considère pas comme apte à l’être) et que le statut de Gabriel Matzneff faisait de lui un intouchable. 

Les livres de Gabriel Matzneff ont rendu son enfer éternel, la livrant en pâture au public. Elle écrit alors le sien pour «prendre le chasseur à son propre piège et l’enfermer dans un livre».

Crédit photo couverture @Causeur

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