étudiante

Je suis une soeur, une étudiante, une prostituée

Ecrit par Justine Andanson
le 1 novembre 2007

« Nous on appelle ce boulot : la débrouille. On ne trouve pas de jobs compatibles avec nos heures de cours, alors il faut se débrouiller ». Allure tranquille, démarche assurée, sourire rêveur, Aline (son pseudo) n’a pas vraiment la tête de l’emploi. « Je suis en fac de médecine et au bout d’un moment […]

« Nous on appelle ce boulot : la débrouille. On ne trouve pas de jobs compatibles avec nos heures de cours, alors il faut se débrouiller ». Allure tranquille, démarche assurée, sourire rêveur, Aline (son pseudo) n’a pas vraiment la tête de l’emploi. « Je suis en fac de médecine et au bout d’un moment l’argent commençait à manquer, je faisais des petits tafs par-ci par-là mais avec mon prêt étudiant, le loyer, les factures, les courses, je n’y arrivais plus ». C’est là qu’une de ses copines l’a présentée à un « ami ». Cet ami c’est maintenant son mac, Aline se prostitue pour payer ses études. Une réalité qui touche près de 40 000 autres étudiants en France, des filles mais également des garçons.
« Au début je n’étais qu’une escort girl, j’accompagnais les riches clients à leurs rendez-vous et aux soirées. Je pouvais me faire de 200 à 300 euros par semaine juste en sortant ». Seulement la machine lancée les escortes « simples » se font rares, et les « petits plus » sont sans cesse demandés. « Du jour au lendemain on m’a dit qu’il fallait être plus gentille avec les hommes. Au début je pensais naïvement être plus conviviale mais on m’a proposé 400 euros si je passais une nuit avec le client. J’ai refusé, j’étais abasourdie, dès ce rejet mon patron ne m’a plus appelé. Il n’y avait plus de boulot pour moi ». Au bout de plusieurs mois de galère Aline a rappelé son ancien boss et a oublié ses convictions au profit de l’argent. Un boss devenu mac, une étudiante devenue prostituée, c’est aujourd’hui sa réalité.
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La prostitution étudiante est discrète et peu de filles s’aventurent sur les trottoirs. Tout commence souvent par une réponse à une annonce pas très claire. Service de massage, de femme de ménage, ou même jardinier, tout peut être à connotation sexuelle.Virginie Despote, assistante sociale, s’occupe de tels cas. « Ils ne veulent pas se prostituer mais gagner de l’argent. Parfois il n’y a pas de sexe mais ce sont des formes de soumission qu’on leurs demande. J’ai essayé de sortir un jeune étudiant de cette galère. Il avait 23 ans à l’époque, il faisait des heures de ménages après ses cours chez une femme célibataire d’une quarantaine d’année. Le ménage devait être fait nu, s’il allait plus loin il avait un bonus mais il n’était pas obligé ». A la question comment les étudiants en sont-ils arrivés là ? La réponse de l’assistante sociale ne se fait pas attendre : « on ne leurs a pas laissé le choix. Des milliers d’étudiants vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Les bourses ne sont pas assez conséquentes, certains n’y ont pas droit car le revenu des parents est trop élevé. Mais ce chiffre ne compte pas le nombre de crédits souscrit par la famille. Ajoutez à ça : la hausse des prix de l’immobilier, les cités universitaires bondées et un pouvoir d’achat quasi nul ».
Avec Internet le marché du sexe a littéralement explosé, les étudiants se servent de cet outil pour trouver des clients. Aline en fait partie, elle s’est lancée il y a peu dans ce biz virtuel. « J’avais peur des hommes violents. On ne m’avait encore rien fait mais je savais que si je restais là-dedans ça allait m’arriver. J’ai préféré m’orienter sur le web où je propose des strip-teases par webcam. Souvent ils veulent que l’on se rencontre pour un plus. Si je suis en manque d’argent et que la personne à l’air « normal » j’accepte, sinon je m’en tiens au virtuel ». Un vague sourire éclaire son visage, quelques larmes coulent de ses yeux, « vous savez je ne suis pas une pute, je suis seulement fauchée ». Ses parents ne sont au courant de rien, ils pensent qu’elle bosse à Mac Do ou autres jobs étudiants, « ils sont heureux tout simplement. Je ne leurs demande jamais d’argent, ça change de ma grande sœur. En connaissant la vérité ils seraient nettement moins fières, mais je ne compte pas leurs avouer ma situation ». Lorsqu’on parle d’avenir Aline se transforme en étudiante modèle. Elle pense devenir pédiatre. « Si je fais tout ça c’est pour réussir, vendre mon corps me permet d’avoir plus de temps que n’importe quel job. Je révise, j’améliore mon niveau et si je dois renoncer à ma dignité pendant quelques années, je le ferais ». Pour Julie Auges, pédopsychiatre, cette façon de penser et de concevoir la prostitution est dangereuse. « Aline voit son activité comme une opportunité et n’essaye plus de trouver une autre solution. Cette attitude peut se révéler autodestructrice. Plusieurs années dans la prostitution laissent des marques ».

Il faudra se reconstruire, réapprendre à aimer, éviter de banaliser l’acte sexuel, un apprentissage long et douloureux. Pour reprendre le contrôle de sa vie après une telle expérience il est nécessaire de consulter un psychologue. La prostitution étudiante n’est pas à prendre à la légère. Paumé, fauché, tomber dedans est simple mais le chemin inverse est semé d’embûches. Un acte désespéré régit par une seule loi « c’est la monnaie qui dirige le monde ».

Par Belinda Kheddouche

#Étudiante #argent #besoin #jeunesse #payer #prostitution #solitude
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